Résonance 4

Installation 2012 – Resonance 4, Se défaire –

Galerie Point de vue, Lauzerte 2016 / Parcours de sculpture, Giroussens 2015 / Ancienne Poterie de Gradignan, Gradignan 2015 / LAFABRIK, Aurillac 2015 / Centre de Céramique Contemporaine, La Borne 2012 / 13ième biennale de la Céramique, Andenne, Belgique 2012

Résonance 4

Résonance est un protocole d’engendrement des formes qui relève à la fois d’une logique quasi mathématique et d’une logique plus sourde, plus puissante, celle de la confrontation qui est au cœur de l’art entre chaos et émergence, entre forme en latence et forme en devenir.

Au départ de cette suite, il y a un tube de 70 cm de haut, dont l’extérieur est blanc et l’intérieur d’un rouge doré, évoquant une sorte d’écriture intime, dissimulée au regard.

Chaque pièce qui suit mesure 10 cm de moins de haut, lors même que les 10, puis 20, puis 30 cm de tube devenus fine bande continue tombent à l’intérieur du tube.Au terme du déploiement de l’ensemble des formes contenues dans ce programme spécifique, les bandes finissent par sortir du tube.

Elles ressemblent à un amas plutôt inorganisé, mais qui conserve les contours tube, comme un fond de mémoire retient les contours d’une idée.

À la source de Résonance 4 il y a une expérience banale, celle d’avoir retrouvé des paniers remplis de fils, de bouts de laine, de rubans, restes de travaux de couture fort anciens. Ces petites merveilles entassées dans la cabane de l’oubli sont revenue au jour après plus de dix ans d’abandon.

Grande fut la tentation de plonger la main dans ce chaos et de tenter d’y remettre un peu d’ordre, en défaisant des nœuds, en rembobinant les fils, en rangeant donc afin de redonner vie à ce paquet de mémoire informe, afin que ces fils de mille couleurs puissent à nouveau servir à coudre des vêtements, cette protection si vitale, pour les prochains nouveaux venus de la famille.

https://schlagenhauf-ceramique.com/wp-content/uploads/2017/08/Daniela-Serie-résonance-4b-600x1000.jpg

Ces fils entassés dans le panier du temps ont comme été défaits par l’oubli, cette tentaculaire absence de soin, mais revenus au jour ils apparaissent porteurs de la magie du rêve, un rêve de soie, de brocart, de couleur, d’enveloppes chatoyantes qui peuplent le passé des femmes, souvent. Car ces fils ne sont rien d’autre que ce qui désigne tout ce qui rattache la vie à la vie.

L’aspect le plus important de cette série tient cependant en ceci que le processus créateur qui est présenté est en quelque sorte inversé puisqu’il nous fait remonter de l’ordre vers le chaos. L’enjeu de cette série est en effet tout entier contenu dans les devenirs possibles de cet amas blanc et rouge qui est à la fois le terme d’une démarche et le point de départ d’une nouvelle création. Tas, pelote, huit de l’infini, structure en croissance, le devenir de ces 70 m de ruban est à la fois ouvert et indécis.

Ce fouillis de ruban rouge et or est bien né de la même logique que celle qui a présidé à Résonances 4. Toujours, il s’agit de la main d’une femme qui se surprend un jour à répéter des gestes accomplis par la main de sa mère, de sa grand-mère, par les mains des femmes qui, depuis toujours rangent, préparent, soignent, gestes sans lesquels aucun devenir, aucun nouveau fil de vie ne pourrait à nouveau se dérouler.

https://schlagenhauf-ceramique.com/wp-content/uploads/2017/08/Daniela-Serie-Andennes-600x400.jpg

13ième biennale de la Céramique, Andenne, Belgique 2012

Si Résonance 4 a pour titre « se défaire », c’est aussi que « se défaire » est un jeu, un jeu merveilleux mais auquel il est préférable de ne pas se laisser prendre. En effet, à la fin du jeu il n’y a que deux solutions. La première, c’est, bien sûr, la destruction. Ici, elle prend la forme d’une déstructuration de la porcelaine, mais peut conduire à la rupture pure et simple du ruban, du fil, et avec lui de la vie. La seconde, c’est la chance d’une restructuration. Elle seule porte la promesse d’un possible trouvant sans source dans la latence du devenir.

C’est ce que nous raconte cette ligne enroulée sur elle-même, ce qu’elle nous dit, nous chante, qu’à force de trop cacher pour se montrer, on risque de trop montrer sans rien pouvoir cacher.

Jean Louis POITEVIN, Mars 2012